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L’attitude de la Russie face à l’intervention de L’OTAN en Libye

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L’attitude de la Russie face à l’intervention de L’OTAN en Libye

La résolution 1973, adoptée le 17 mars 2011 par le Conseil de sécurité de l’ONU, autorise les Etats membres, agissant à titre individuel ou au sein d’organisations régionales, à prendre toutes les mesures nécessaires pour protéger les civils libyens. Les implications politiques de cette résolution vont au-delà de la situation politique en Afrique du nord et dans les pays arabes plus généralement. La guerre en Libye et l’intervention de l’OTAN (les opérations d’attaque sont menées essentiellement par les forces françaises et britanniques) entraînent des conséquences importantes sur l’échiquier politique mondial. Particulièrement intéressante est l’attitude adoptée par la Russie lors du vote sur cette résolution au Conseil de sécurité. Son étonnante décision de ne pas se prévaloir de son droit de véto pour bloquer la résolution requière de s’attarder et d’analyser les raisons de ce refus. Cet épisode suggère une réorientation dans la politique étrangère de la Russie, sous l’impulsion du président Dmitri Medvedev, et permet d’entrevoir l’avenir des relations entre la Russie et l’Occident.

De la Guerre de Corée à l’Irak, la Russie s’est toujours opposée à des interventions militaires dans des pays étrangers en raison de son respect strict du principe de non-ingérence dans les affaires intérieures des Etats souverains. L’ancien homme politique et ministre des Affaires étrangères (1957-85) de l’Union soviétique, Andreï Gromyko, reçut le sobriquet de M. Nyet en raison de son rejet continuel des propositions d’intervention venant de l’Occident. Cette politique prudente a persisté même après la fin de la Guerre froide au début des années 1990.

La Russie n’a pas pu empêcher ni les bombardements aériens de l’OTAN en Serbie en 1999, ni l’invasion de l’Irak par une coalition d’Etats dominée par les Etats-Unis en 2003. Son choix d’user de son droit de veto dans ces deux cas lança un message clair à l’Occident, à savoir qu’elle s’oppose à l’agression militaire contre des Etats souverains sans l’autorisation des organisations internationales. En conséquence, en 1999 et 2003, les relations entre la Russie, l’OTAN et les Etats-Unis atteignirent leur point le plus bas dans la période de l’après-guerre froide. Dans la crise actuelle en Libye, la Russie, pour la première fois, ne tente pas de faire obstacle à la voie choisie par l’Occident. Qu’est-ce qui a changé depuis 2003 ? Y a-t-il un lien entre la nouvelle politique étrangère de la Russie sous Medvedev et son abstention lors du vote à l’ONU sur la résolution 1973 ? Il faut répondre par l’affirmative à cette dernière question. En cautionnant l’intervention militaire en Libye, Moscou évite de compromettre ses liens avec les Etats-Unis et l’Europe occidentale. Deux facteurs cruciaux sont à l’origine de cette prise de position courageuse: le besoin urgent de la Russie d’accélérer sa modernisation économique avec l’aide de l’Occident et le succès relatif de la « remise à zéro » de ses relations avec les Etats-Unis.

Récemment, Moscou a redéfini sa politique étrangère en mettant l’accent essentiellement sur la modernisation de son économie. La Russie ne peut aspirer à redevenir un acteur majeur sur la scène internationale sans investir davantage dans son développement technologique et l’amélioration de ses infrastructures. La revitalisation de son économie et l’adhésion à l’Organisation mondiale du commerce (OMC) sont deux des priorités établies par les dirigeants russes contemporains. La Russie cherche donc à tisser des relations plus étroites avec les pays en mesure de l’aider dans son projet de modernisation. Les Etats-Unis se trouvent en tête de liste en raison de leurs prouesses technologiques et de la qualité de leurs universités les plus prestigieuses. De manière générale, Medvedev et les « modernistes » pensent que l’Organisation de coopération et de développement économique (OCDE) est un terreau à exploiter dans cette quête.

L’amélioration des relations entre la Russie et l’Occident est largement le résultat des travaux de la Commission Obama-Medvedev (connue officiellement sous le nom de la Commission bilatérale présidentielle russo-américaine) constituée en juillet 2009 lors du sommet de Moscou. Elle vise à renforcer la coopération entre les deux pays sur un large éventail de questions. Après avoir atteint un creux historique suite au conflit armé entre la Russie et la Géorgie en août 2008, la coopération américano-russe est de nouveau à la hausse grâce à cette Commission qui comprends dix-sept groupes de travail co-présidés par de hauts fonctionnaires russes et américains et qui est coordonnée par Hilary Clinton, secrétaire d’Etat américaine, et Sergueï Lavrov, ministre russe des Affaires étrangères.

La Commission Obama-Medvedev a produit des résultats notables depuis sa création : accord sur le contrôle des armements et la non-prolifération nucléaire (« nouveau START »), efforts conjoints pour lutter contre le terrorisme et le trafic de drogue, l’engagement de la Russie pour aider la mission de l’OTAN en Afghanistan, pour n’en citer que quelques-uns. Le fait que le Kremlin ait abandonné son ancienne politique d’opposer son veto systématique au sein du Conseil de sécurité des Nations unies peut être également interprété comme un succès de la « remise à zéro » dans les relations américano-russes.

Bien que le choix de l’abstention sur la résolution 1973 soit extrêmement controversé au sein de l’élite politique russe actuelle, le président Medvedev, par cette décision, indique clairement la nouvelle orientation qu’il entend donner à son pays. Il est également probable qu’il d’exploitera les circonstances de la guerre en Libye pour les fins de sa campagne électorale en vue de la présidentielle russe de 2012.

Les opinions exprimées dans ce blogue sont strictement personnelles et ne reflètent pas nécessairement celles de Global Brief ou de l’École des affaires publiques et internationales de Glendon.

Caveat lector: The opinions expressed in this blog are personal and do not necessarily reflect the views of Global Brief or the Glendon School of Public and International Affairs.

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