LOADING

Type to search

Le grand retour

GB Geo-Blog

Le grand retour

Après avoir séjourné six mois en France, ma petite famille et moi repartons pour le Canada la semaine prochaine. Je vous ai dis en début d’année que je ne vous ferais pas de blog de voyage. Je me permets, toutefois, de faire une liste de ce qui me manquera, et de ce que je tenterai d’oublier le plus rapidement possible dès mon retour.

Commençons avec le positif!

L’Alsace : Nous y sommes depuis janvier maintenant. Nous en avons visité plusieurs recoins. C’est une région qui, d’une certaine façon, est mal connue des Canadiens. Même en France, elle n’a pas toujours bonne réputation. Une amie originaire des environs de Toulouse nous suggérait que les alsaciens n’étaient pas vraiment français (ce que certains alsaciens ne nient pas). Un coiffeur à Paris rappelait à ma femme que les gens étaient supposément froids en Alsace. Et, pourtant… Il y a ici quelque chose de tout à fait unique. L’accueil a été chaleureux. L’Alsace, c’est le pays de la choucroute, du riesling, du colombage, etc. C’est une belle région, des Vosges jusqu’à la plaine. Dire que nous partons avant qu’elle ne prenne toutes ses couleurs!

L’absence de poste frontalier : C’est la plus grande réussite, sans contredit de l’Europe. Il est possible de se promener partout à travers l’espace Schengen sans difficulté. La libre circulation à la frontière franco-allemande, tout particulièrement, c’est quelque chose de remarquable. L’Alsace, justement, a été ballotée au gré de l’histoire. La libre circulation des personnes ici est un réel exploit, la preuve d’une destinée commune (au-delà des querelles politiques franco-allemandes quotidiennes).

La couverture de l’actualité : Je suis abonné au journal le Monde depuis mon arrivée en France. Je consultais le site web du journal auparavant, mais avoir la version papier en main est bien mieux. L’analyse y est soignée et poussée. C’est à la fois un regard et une réflexion sur l’actualité.

J’ai beaucoup aimé aussi Les matins de France culture. L’émission est structurée autour d’une entrevue en profondeur, et de plusieurs commentaires sur l’actualité. C’est brillant! Et, tant pis si ce n’est pas pour tout le monde! L’information de masse a ses limites. Formidable, France culture offre une émission du matin qui ne fait pas de bulletins de circulation, et à peu près pas de météo! Côté contenu, l’équivalent canadien le plus près serait The Agenda à l’antenne de TVO.

Nous avons, ici, la preuve que l’opinion de l’expert compte encore en France. Les universitaires, entre autre, ont leur place, tant à l’écrit qu’à l’électronique. Pourquoi le point de vue de l’expert est-il encore respecté en France (en Europe?) alors qu’il l’est de moins en moins au Canada?

Le transport en commun : Nous avions loué une maison en banlieue de Strasbourg. Pour me rendre à l’Université, je prenais mon vélo et me rendais à la gare de train. Je montais avec mon vélo sur le train. Une fois arrivée à Strasbourg, je pédalais sur une piste cyclable jusqu’au bureau. On me dit que c’est possible à Seattle. Je ne sais pas… Ce ne l’est certainement pas à Toronto! Faites que ce soit facile de prendre le transport en commun, au-delà des exhortations usuelles, et les gens s’y intéresseront.

Maintenant, voici ce qui est à oublié.

Les tracasseries administratives de l’État français : Si vous êtes capable de comprendre l’histoire suivante, vous méritez un doctorat en droit ou en administration publique.

Je suis venu en France sur un visa de scientifique. En passant, l’histoire s’applique aussi à ma femme (comme épouse d’un scientifique), mais pas aux enfants qui ont eu droit à un visa de six mois (grâce à de récentes exemptions réglementaires). À mon arrivée, je devais faire la demande pour l’obtention d’une carte de séjour. Ce que je n’avais pas réalisé à l’obtention du visa, c’est que le visa ne permettait pas de voyager à travers l’espace Schengen. Il m’était possible de quitter l’espace Schengen et de revenir en France, mais de Strasbourg il m’était techniquement interdit de voyager du côté de Kehl en Allemagne. Je ne pourrais voyager qu’une fois la carte de séjour obtenue. Comme scientifique, cela m’apparaissait, et m’apparaît encore, comme étant absurde. J’étais venu en Europe pour faire de la recherche, pour voyager et pour participer à des conférences sur le continent. Si je ne pouvais pas voyager, je ne pouvais pas faire mon boulot, surtout que la durée total de mon séjour était déjà prévu à six mois. Si j’ai obtenu le visa, de prime abord, c’est que je ne posais pas un danger immédiat à la société. Je me suis, donc, informé de la marche à suivre pour voyager à travers l’Europe avec le visa, avant l’obtention du titre de séjour. Ce que l’on ma répondu, c’est que l’entrée aux autres pays de la zone Schengen n’était pas garantie. Plus important encore, pour revenir en France il me faudrait contacter le consulat français le plus proche et obtenir un visa de retour. Imaginez, je voulais aller en Suisse, pays de la zone Schengen depuis 2008, or pour revenir en France, il était officiellement nécessaire de faire le détour par le consulat de Genève pour obtenir un visa de retour. Franchement! Les préfectures françaises pouvaient avant fournir ce visa de retour, or des modifications à la réglementation en 2009 ont changé la donne. Je me suis fait référer à un avocat qui m’a dit que la réglementation n’était pas appliquée de façon uniforme. Certaines préfectures octroyaient encore le visa, d’autres non. À la préfecture du Bas-Rhin, le refus fut catégorique.

J’ai une question à mes amis juristes. J’habitais en France sur un visa, j’étais, donc, là depuis moins de trois mois. Comme canadien, je peux être en Europe trois mois sans visa. Quelqu’un peut m’expliquer comment l’un de mes droits en tant que citoyen canadien peut se retrouver subordonné par une demande administrative ayant cours dans un autre pays? Je mélange peut-être tout, mais le visa de scientifique et la demande de carte de séjour m’enlevait un droit que je possédais comme citoyen canadien, soit celui de circuler en Europe trois mois sans encombre. La hiérarchie des droits et obligations dans cette circonstance m’échappe.

Tout ceci ne serait pas catastrophique si la carte de séjour était octroyée rapidement. Or, cela prends, tout de même, plusieurs mois. En surplus, les informations pour l’obtention du visa scientifique et l’obtention de la carte de séjour sont les mêmes. Surtout, surtout, les ministères impliqués n’ont pas le droit de se la partager. Il serait facile d’accélérer le processus si l’on permettait à l’information de couler. Mais, non… J’ai finalement eu ma carte de séjour, au coût de 300 euros. Beau système!

Pour être juste, la situation semble en voie de se résorber. Le visa scientifique deviendra bientôt un visa Schengen, ce qui est, sans contredit, un pas dans la bonne direction. Ce n’est pas complet, mais c’est un départ.

Le milieu universitaire français : J’ai été très bien reçu à l’Université de Strasbourg. Mon expérience a été très positive. J’ai été bien accueilli par Mr. Le Directeur de Science Po. J’ai eu un excellent collègue de bureau. Mon cours s’est très bien déroulé. Je ne peux vraiment pas me plaindre.

J’ai également découvert que je ne voudrais pas faire carrière dans le système universitaire français. Il y a certains avantages, en particulier au niveau du rôle des centres et équipes de recherche. Le milieu universitaire, cependant, reste fermé. C’est une clique. Il faut trouver sa place dans les réseaux. Pour cela, il faut connaître les bonnes personnes, avoir les bons contacts. La performance compte, mais être bien placé compte encore plus. Mon collègue de bureau était parisien. Cela fait six ans qu’il est à Strasbourg et il m’affirmait qu’il commençait à peine à pénétrer les réseaux locaux. Il me semble que de nos jours, ce type d’arrangement, ce type de système, est dépassé. Il est difficile de faire carrière si le gros se joue au niveau des connections. Le système universitaire français, une méritocratie? Plutôt, une méritocratie défigurée!

Voilà, c’est déjà bien assez long comme ça!!!

Caveat lector : Les opinions exprimées dans ce blogue sont strictement personnelles et ne reflètent pas nécessairement celles de Global Brief ou de l’École des affaires publiques et internationales de Glendon.

Categories:
Tags:

You Might Also Enjoy This in GB

Leave a Comment