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Electeur de la 11ème circonscription des Français de l’étranger, français de nulle part

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Electeur de la 11ème circonscription des Français de l’étranger, français de nulle part

Le second tour des élections législatives pour les Français de l’étranger se termine sur Internet. Pour la première fois, les citoyens établis hors de France étaient appelés à désigner onze députés. Le constat de cette élection est, malheureusement sans doute, un échec total, que la très faible participation ne fait qu’illustrer. Mais au-delà de cette élection, c’est la question de la représentation des Français de l’étranger, très inégale, qui doit être posée en vue des échéances électorales futures.

Avec un taux total de participation qui dépasse à peine 10% pour le premier tour (les résultats pour le second pourraient être encore plus faibles), c’est un euphémisme que de parler de très faible engouement pour cette élection. 10% d’inscrits, cela signifie qu’il suffit pour un candidat d’obtenir 5% pour être élu à l’Assemblée nationale (sachant que dans un tel schéma, la possibilité de voir des triangulaires au second tour était impossible, les deux candidats arrivés en tête ne rassemblant même pas 12,5% des inscrits à eux-deux dans certains cas !). Considérer qu’un parlementaire élu avec 5% des inscrits est légitime relèverait presque de l’insulte à la démocratie et au fonctionnement des institutions, et traduit un réel malaise dans la représentation des Français de l’étranger.

L’UMP et le Parti socialiste ont, sans surprise trusté les premières places en l’absence totale de débat et, en dehors d’une avalanche pénible d’emails souvent passés à la corbeille sans avoir été ouverts, sans aucune visibilité. Dans les onze circonscriptions, les seconds tours se sont joués entre les candidats de ces deux partis. On constate pourtant, dans la pléiade des candidats (vingt au total pour la 11ème circonscription, qui est également la moins peuplée, on imagine les résultats de certains…) que ce sont ces deux partis qui ont le plus souvent privilégié des parachutages, des places quasi acquises pour des élus en mal de reconversion. Face à eux, les candidats « du cru » ne parvinrent pas à rivaliser malgré une connaissance plus marquée de la communauté française de l’étranger. Résultat, les Français de l’étranger seront représentés par des députés qui n’ont pas forcément d’expertise (et parfois pas du tout) de leur circonscription.

De nombreux électeurs ont relevé les dysfonctionnements du mode de scrutin. Certes, il était possible, comme en France et les DOM-TOM, de se rendre dans les bureaux de vote, généralement au sein des ambassades et consulats. Problème toutefois, ces bureaux de vote sont parfois distants de plusieurs centaines de kilomètres (et parfois même plus). On ne vote pas à l’étranger comme on le fait en France, dans l’école du quartier, à la sortie du marché ou avant d’aller diner et regarder la soirée électorale à la télévision ! Cela n’est pas en soi critiquable, et contrairement aux Présidentielles – où le taux de participation fut également, bien que dans une moindre mesure, très faible – il était possible de voter par Internet. A condition de passer les multiples obstacles informatiques, liés à l’utilisation d’anciens systèmes de sécurité, et des procédures qui en découragèrent plus d’un. Au final, les Français de l’étranger pouvaient voter de chez eux (ce qui est un luxe) mais malgré leurs efforts, nombreux furent ceux qui las, choisirent l’abstention par défaut.

Certains s’interrogent sur la pertinence d’avoir des députés des Français de l’étranger, ces derniers étant déjà représentés par des sénateurs, sans oublier l’Association de Français de l’étranger (AFE), chargée de représenter leurs intérêts. D’autres ont relevé qu’il serait plus utile d’accorder le droit de vote aux élections locales aux étrangers installés vivante n France plutôt qu’à des Français ayant fait le choix de vivre à l’étranger. Difficile dans ces conditions de mener une campagne bénéficiant d’un écho digne de ce nom, et justifiant l’importance de cette élection. Dans les onze circonscriptions, on relève ainsi les mêmes problèmes.

La 11ème circonscription est en tout cas la plus insolite, voire la plus absurde, de toutes, et au-delà des considérations techniques et du peu d’intérêt pour une campagne dont les véritables effets se feront sentir à des milliers de kilomètres, il convent de tirer des enseignements de ce fiasco. Cette circonscription couvre un espace géographique qui en fait l’ensemble le plus étendu de la planète. De La Russie au Pacifique, en traversant l’Asie, elle s’étend sur plusieurs continents, des cultures qui n’ont rien en commun, et par voie de conséquences des Français de l’étranger qui vivent dans des conditions en rien comparables. Si on fait abstraction du fait qu’il est difficile pour un candidat de défendre les intérêts d’un tel ensemble hétéroclite, sinon à privilégier ses propres intérêts (peut-on parler de carriérisme ?), cette délimitation géographique tient presque de l’insulte faite à ces Français de nulle part, dont le seul intérêt serait de désigner un parlementaire en vue de faire gonfler un groupe politique au Palais Bourbon. Pendant cinq ans, nous serons représentés par un député qui, même avec toute son énergie et sa volonté, sera réduit à voter des projets de loi et à suivre son groupe, sans jamais avoir le moindre impact sur les Français qui l’ont élu (malgré leur faible nombre…) et de manière plus générale sur ceux qu’il est censé représenté. Sa fonction de représentant d’une circonscription et de son électoral n’est donc qu’officielle, et ne traduit en rien son engagement politique.

On ne saurait certes exiger plusieurs députés pour un nombre limité de personnes, au risque de déséquilibrer l’assemblée. Il serait toutefois sage de réfléchir à une représentation qui soit susceptible d’intéresser les Français de la 11ème circonscription aux questions politiques plus que les simples références aux frais de scolarité, qui semblent parfois être le seul argument électoral, comme si les Français vivant à l’étranger n’avaient que cette considération à l’esprit. Cela ne pourra se faire qu’avec des représentants vivant eux-mêmes à l’étranger, et non par des représentants de partis politiques très éloignés des enjeux d’une région par ailleurs indéfinissable. Pour y parvenir, sans doute faudra-t-il imposer des règles de résidence dans la circonscription, ou une expérience indiscutable sur la zone (notamment dans l’AFE), à la manière de l’embauche d’un personnel qualifié. Nous en sommes malheureusement, et cette élection ne fait que le confirmer, encore très loin, et tant que les partis politiques ne verront dans les Français de l’étranger que des chiffres, cela ne changera pas, et les Français de la 11ème circonscription resteront des français de nulle part.

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