Les nouveaux horizons de Pyeongchang
La désignation des villes organisant les Jeux Olympiques est généralement l’objet d’âpres luttes, de votes à répétition, de jeux se jouant dans les coulisses et de résultats serrés que n’hésitent pas à contester les vaincus. Le choix de la petite ville coréenne de Pyeongchang pour l’organisation des Jeux Olympiques d’hiver de 2018 s’écarte de cette logique. Certes, la candidature coréenne était déjà bien connue du CIO, puisqu’à deux reprises, pour les Jeux de 2010 et ceux de 2014, Pyeongchang avait échoué lors du prestigieux vote, ne cédant face à la ville russe de Sotchi qu’après une lutte serrée. La victoire était presque programmée pour cette fois, d’autant que les autorités coréennes avaient déjà investi des dizaines de millions d’euros pour développer des infrastructures dans le cadre des candidatures précédentes. La persévérance a donc ici payé.
On retiendra cependant du succès de Pyeongchang, qui deviendra à la fois la deuxième ville coréenne à organiser les Jeux Olympiques (après ceux d’été de Séoul en 1988) et la deuxième ville asiatique à organiser les Jeux d’hiver (après Nagano en 1998), deux éléments importants. Le premier est bien sûr le décalage entre cette petite ville totalement inconnue à échelle internationale, et le profil de ses rivales. En particulier Munich. La ville allemande n’a en effet pas pesé lourd face à la petite ville coréenne. Le cas d’Annecy, prestigieuse cité alpine, est tout aussi flagrant. Malgré leur notoriété, ces deux villes ont rapidement vu leurs espoirs réduits un néant, et un seul tour de scrutin fut nécessaire. La victoire de Pyeongchang, c’est le succès écrasant du petit contre les grands.
Le deuxième élément se résume dans le slogan de la candidature de Pyeongchang, « de nouveaux horizons ». Une autre manière d’indiquer l’importance que représente désormais l’Asie dans tous les domaines, y-compris l’organisation des évènements sportifs internationaux. Les exemples récents, Jeux Olympiques de Pékin de 2008 en tête, confirment la capacité des pays de la région à exceller dans le domaine, et avec la coupe du monde de football de 2002 ou les championnats du monde d’athlétisme qui se tiendront en septembre prochain à Daegu, la Corée du Sud n’est pas en reste. Si on ajoute à cela le fait que des Jeux d’hiver en Asie ouvrent de nouvelles perspectives en matière de développement de sports encore peu pratiqués dans cette région, tous les arguments penchaient de fait plus que sensiblement en faveur de Pyeonchang.
Face à cette machine de frappe, les candidatures allemande et française furent totalement dépassées. Il s’agit même, pour ces deux pays, d’une énième défaite, si on tient compte des multiples tentatives avortées ces dernières années. Comme quoi le fait d’avoir déjà présenté des dossiers et, (dans le cas de Paris pour 2012) échoué de très peu, ne garantit pas nécessairement de meilleures chances. Notoriété et persévérance ne suffisent donc pas si elles restent isolées et ne s’accompagnent pas d’un véritable projet capable de séduire les électeurs, et d’incarner dans le même temps une tendance qui associe sport et géopolitique. Car, et c’est ce qui fait à la fois son mérite et constitue son plus grand défaut, le CIO est une assemblée d’anciens sportifs qui votent en se basant sur des critères essentiellement politiques.
Le succès de Pyeonchang doit enfin également beaucoup au britannique Mike Lee, qui après avoir contribué très largement aux victoires de Londres 2012 et Rio de Janeiro 2016 ainsi qu’à la coupe du monde de football 2022 octroyée au Qatar, a apporté un soutien crucial à la candidature coréenne en offrant ses talents de communicateur. En parvenant à convaincre les représentants nationaux du CIO, il a une nouvelle fois donné une leçon de lobbying dont ses adversaires allemands et français seraient bien inspirés de prendre pour exemple s’ils ne veulent pas essuyer des échecs à répétition.
En attendant, bravo à Pyeongchang, et vivement ces Jeux coréens qui seront, à n’en pas douter, une grande réussite!
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