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Chine 3.0 et au-delà

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Chine 3.0 et au-delà

L’équipe de l’European Council on Foreign Relations, le think tank européen dirigé par Mark Leonard, vient de sortir un collectif (téléchargeable gratuitement sur le site de l’ECFR) au titre évocateur : China 3.0.

L’idée centrale de ce collectif qui rassemble experts chinois et occidentaux est d’identifier les enjeux auxquels fait face la nouvelle génération de dirigeants, avec à sa tête Xi Jinping. S’il s’agit de la cinquième génération, depuis Mao Zedong, Leonard et son équipe estime qu’il s’agit plus précisément d’un moment particulier dans l’histoire contemporaine de la Chine, après la Chine 1.0 du grand timonier, et la Chine 2.0 de Deng Xiaoping, celle du libéralisme économique. Les générations incarnées par Jiang Zemin et Hu Jintao ne seraient dès lors que transitoires, annonçant les inévitables changements à venir et prolongeant l’irrésistible montée en puissance de la Chine, mais sans véritablement la transformer en profondeur. On peut bien sûr discuter de la pertinence de ce choix, mais force est de reconnaître qu’il est plutôt judicieux, compte-tenu de l’absence d’une réelle révolution dans la vie politique, économique et sociale chinoise depuis la mise en place des réformes de Deng. Les trois dernières décennies n’offrent pas de véritable rupture d’une transition de leadership à l’autre.

A l’inverse, l’arrivée au pouvoir de la cinquième génération marque l’entrée dans une nouvelle ère, dans laquelle la Chine est à la croisée des chemins. D’un côté, la crise économique internationale a accéléré le processus de transition hégémonique, et en parité de pouvoir d’achat, l’empire du milieu sera première puissance économique mondiale dès 2016, selon un récent rapport de l’OCDE, rendu public la veille du 18ème Congrès du PCC, celui-là même qui officialisa l’arrivée au pouvoir de Xi Jinping. La Chine est également désormais un acteur politique incontournable, et ses positions sur le Moyen-Orient, sur le réchauffement climatique ou encore sur la fracture Nord-Sud sont aussi attendues que celles des grandes puissances occidentales, y-compris les Etats-Unis. La Chine est une superpuissance, elle fait aussi face à de multiples responsabilités directement liées à ce nouveau statut. L’ère de Deng Xiaoping, qui prônait un profil bas sur la scène internationale, semble bien révolue.

La Chine 3.0, c’est aussi un pays en proie à des difficultés internes de grande ampleur, que le ralentissement, même relatif, de la croissance économique ne fait qu’accentuer. Les hausses salariales, les réformes dans le monde du travail et une meilleure répartition des richesses sont indispensables si l’Etat-parti ne veut pas, à terme, être pris pour cible des multiples mouvements sociaux qui agitent le pays. L’exemple de Wukan est encore sur toutes les lèvres, et la nouvelle génération de dirigeants sait qu’elle ne pourra pas occulter un vaste débat au sein du parti sur cette question. La lutte contre la corruption est également au cœur des priorités des dirigeants chinois. Hu Jintao et Xi Jinping ont insisté sur cette question lors du Congrès, comme pour rappeler que la survie du parti en dépend. Enfin, les réformes politiques ne sont pas absentes des grands travaux à venir. Quelle direction prendront-elles ? Quels choix seront adoptés ? Il est difficile de se prononcer sur cette question, tant les rivalités à l’intérieur de l’appareil politique sont nombreuses. Mais la question fait débat.

La Chine 3.0, c’est enfin, au-delà de cette dualité, une société d’1,4 milliards d’individus, un demi-milliard d’internautes, 800 millions de pauvres (selon les autorités), une classe moyenne nombreuse et exigeante, et une activité culturelle et sociale d’une ampleur exceptionnelle. La Chine de 2013 ne ressemble décidément en rien au pays qui a traversé la révolution communiste de Mao, ni même à ce géant assoupi qui a embrassé les réformes de Deng. Elle est plus complexe, s’est diversifiée, se veut tantôt séduisante, tantôt arrogante, un peu à la manière des autres grandes puissances. C’est encore un pays en chantier.

Au-delà des passionnants débats sur l’évaluation des maux de la Chine contemporaine, l’élément le plus intéressant de ce collectif concerne les incertitudes concernant les directions que prendront les réformes, et par conséquent l’avenir politique, économique et social de la Chine. En d’autres termes, ce que l’on pourrait qualifier de Chine 4.0. Comprendre la Chine contemporaine et s’efforcer d’en percer les secrets, c’est avant tout prendre en compte ces incertitudes. Mark Leonard s’était essayé à cet exercice difficile, en publiant il y a quelques années un intéressant Que pense la Chine ?, thème qu’il reprend d’ailleurs de manière judicieuse et appropriée dans l’introduction de ce collectif.

Pour télécharger China 3.0 dans son intégralité et visionner les vidéos liées : http://www.ecfr.eu/programmes/china3

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