C’est jour d’élection présidentielle aux États-Unis, quatre ans après la victoire surprise de Donald Trump contre Hillary Clinton en 2016. Trump sera-t-il réélu? On aura peut-être la réponse ce soir. Ou du moins en partie, car il faudra des jours, voire des semaines avant de connaître les résultats finaux, en raison de l’explosion du vote par correspondance à l’heure de la COVID-19. Avec un peu de chance, on pourrait cependant avoir une bonne idée du vainqueur ce soir… ou au petit matin le 4 novembre. Voici quoi surveiller au cours des prochaines heures.

1- Floride. C’est devenu un cliché de le noter, mais si Biden gagne la Floride, il est presque assuré de devenir président. Voici une bonne nouvelle si vous rêvez de ne pas veiller (trop) tard. Les derniers bureaux de vote ferment à 20:00 heure de l’Est dans le Sunshine State. Les résultats pourraient donc tomber rapidement : en 2016, Trump a été déclaré gagnant dans cet État un peu avant 23:00. Si Biden gagne la Floride dès ce soir, le reste ne sera peut-être qu’une formalité.

Trump avait remporté la Floride par 112 911 voix en 2016, soit une marge de 1,2%, mais il serait en retard de 2,5% cette année selon la moyenne des sondages de FiveThirtyEight. En 2016, il avait notamment gagné avec une marge confortable parmi les 65 ans et plus (+17%) et les électeurs blancs (+32%), mais avait perdu les divers électorats latinos par 27%. Selon le plus récent sondage NY Times/Siena College, Biden serait moins populaire que Clinton chez les latinos cette année (+22%). Cependant, Trump serait en retard chez les 65 ans et plus (-2%) et les électeurs blancs (+14%). Il sera intéressant de surveiller les marges chez ces électorats ce soir.

Alors que la pandémie de COVID-19 bouleverse les manières de voter, le taux de participation par anticipation et par la poste en Floride atteint déjà 93,7% du vote total de 2016. Biden souhaite un taux de participation élevé dans des comtés comme Broward, Miami-Dade, Palm Beach et Orange, des bastions démocrates. De plus, il faudra surveiller des comtés comme Duval et Pinellas, où Trump avait gagné de peu en 2016.

2- Caroline du Nord et Arizona. Ce sont deux autres États où l’on pourrait avoir des projections de victoire dès ce soir. Pour mémoire, les bureaux de vote ferment à 19:30 heure de l’Est en Caroline du Nord et à 21:00 en Arizona. Si Biden met la main sur l’un ou l’autre de ces États – ou mieux encore pour lui – sur les deux, le chemin menant à la réélection de Trump se rétrécira considérablement, à moins de surprises au Wisconsin, au Michigan et en Pennsylvanie.

Biden est très compétitif dans ces États à tendance républicaine. Bien que Trump ait remporté l’Arizona par 3,5% en 2016, les derniers sondages le donnent perdant par 2,5%. En Caroline du Nord, Trump tire de l’arrière par 1,8%, alors qu’il avait remporté cet État par 3,7% en 2016.

En Arizona, surveillez le comté de Maricopa, que Trump avait gagné et qui représentait plus de 60 % des votes de cet État en 2016. C’est d’ailleurs grâce à ce comté que Kyrsten Sinema (D-AZ) avait pu remporter un siège au Sénat lors des élections de mi-mandat de 2018.

En Caroline du Nord, il faudra regarder le taux de participation dans les grandes villes de Raleigh (Wake), Charlotte (Mecklenburg) et Greensboro (Guilford). Si les électeurs afro-américains y ont voté en grand nombre, ça pourrait être suffisant pour contrer l’avantage de Trump dans les comtés ruraux et donner la victoire à Biden.

3- Wisconsin, Michigan et Pennsylvanie. Ce sont les États qui avaient fait la différence en 2016. Si Biden gagne les trois tout en conservant tous les États ayant voté Clinton en 2016 (dont le Nevada et le Minnesota), les carottes sont cuites pour Trump, peu importe ce qui se passe en Floride, en Caroline du Nord et en Arizona. Un bémol toutefois : on risque de ne pas savoir rapidement qui remporte au Wisconsin, mais surtout au Michigan et en Pennsylvanie, où le dépouillement des votes se poursuivra pendant plusieurs jours.

En 2016, Trump avait gagné ces trois États par des marges très faibles : 10 704 votes au Michigan, 44 292 votes en Pennsylvanie et 22 617 votes au Wisconsin. Biden est en bonne position au Michigan, avec une avance de 7,9%, et au Wisconsin avec une avance de 8,4% dans les plus récents sondages. Biden a également une courte avance de 2,5% en Pennsylvanie, mais les votes par correspondance y seront dépouillés lentement et pourraient faire l’objet de recours judiciaires. En attendant, voici quelques comtés à surveiller ce soir : Pennsylvanie : Allegheny, Erie, Philadelphia; Michigan : Kent, Macomb, Oakland, Wayne; et Wisconsin : Brown, Dane, Kenosha, Milwaukee.

4- Géorgie, Texas, Ohio et Iowa. Voici quatre États que les démocrates ne s’attendaient pas à pouvoir gagner il y a six mois, mais qui semblent à la portée de Biden. On ne connaîtra pas nécessairement les vainqueurs de tous ces États ce soir, mais s’il y a projection de victoire de Biden dans l’un ou l’autre de ceux-ci, le Texas surtout, les analystes n’hésiteront pas à dire qu’une vague démocrate semble déferler sur le pays. Les bureaux de vote ferment à 19:00 heure de l’Est en Géorgie, 19:30 en Ohio, 21:00 au Texas et 22:00 en Iowa. Selon les plus récents sondages, Biden est plus compétitif dans ces États que Clinton l’était en 2016. Mais gare aux prédictions trop hâtives : Trump pourrait tout à fait gagner ces quatre États comme en 2016.

5- Minnesota. La course s’y est resserrée au cours des derniers jours et Trump croit pouvoir causer la surprise en gagnant le North Star State tout en conservant le Wisconsin, le Michigan et la Pennsylvanie. C’est toutefois une lourde tâche si l’on se fie aux intentions de vote, qui ont été plus stables et plus favorables à Biden en 2020 qu’à Clinton en 2016.

Trump peut-il être réélu? Certes. Mais il faudrait une erreur dans les sondages encore plus importante qu’en 2016.

Pas impossible, mais si on considère que la victoire de Trump en 2016 était aussi chanceuse qu’un tir au panier réussi du fond du terrain à la dernière seconde d’une partie de basketball, sa réélection en 2020 serait l’équivalent d’un tir semblable, mais le dos tourné au panier.

Si on considère que la victoire de Trump en 2016 était aussi chanceuse qu’un tir au panier réussi du fond du terrain à la dernière seconde d’une partie de basketball, sa réélection en 2020 serait l’équivalent d’un tir semblable, mais le dos tourné au panier.

Et connaissant le sens du spectacle de Trump, c’est sans doute la manière dont il rêve de déjouer les pronostics …encore une fois.

***Ce texte a été coécrit avec Louis Collerette, directeur exécutif à la Chaire Raoul-Dandurand