L’Europe à 4 ?
Le “mini-sommet” de Rome, le vendredi 22 juin 2012, a suscité un nouveau phantasme: “l’Europe à 4”. Après “l’Europe à 2” – Allemagne-France, dite “Merkozy” – viendrait le temps d’une “Europe à 4”: Allemagne, France, Italie et Espagne. Et d’agiter le thème d’une Europe à plusieurs vitesses, une réalité avérée depuis longtemps via l’euro et l’espace Schengen mais aussi à travers des performances économiques très variables. Rappelons que le PIB par habitant en 2011 dans les 27 Etats membres a varié de 45 à 274% de la moyenne de l’UE-27…(pdf. Eurostat)
Le jeu de l’Union européenne à 27
Au risque de décevoir, rappelons que le jeu de l’Union européenne a des règles, précisées dans les traités définis par les Etats membres. Jusqu’en 2014, il faut rassembler au moins 255 voix pour qu’une décision soit acquise à la majorité qualifiée au Conseil européen comme au Conseil [des ministres]. Les 4 pays membres rassemblés à Rome pour ce mini-sommet ne rassembleraient – à condition d’être d’accord – que 114 voix (Allemagne, France et Italie disposent chacune de 29 voix et l’Espagne de 27). Autrement dit, il manquerait à cette hypothétique coalition 141 voix pour espérer emporter une décision à la majorité qualifiée. 141 voix qu’il faudrait aller chercher auprès de plusieurs des 23 autres pays membres.
L’Europe des 4 restera un phantasme
Il semble donc très exagéré de parler d’une “Europe des 4”. L’Union est fondée sur la négociation et le compromis entre pays membres. C’est long et difficile, parfois peu approprié en temps de crise, mais toujours mieux que la guerre. Il n’est pas certain que la dramatisation permanente fasse avancer la compréhension de ce système complexe.
Enfin, rien ne prouve que ces 4 pays soient véritablement d’accord sur un deal entre plus de solidarité via la mutualisation d’une partie des dettes souveraines et de nouveaux transferts de souveraineté au service d’une union politique renforcée.
Au-delà du montage qui finira par sortir de ce rapport de force, il restera aux 27 pays membres à relever le défi de leur compétitivité. Rappelons qu’un des effets des élargissements de l’Union européenne (2004 et 2007) a été de repousser aux calendes grecques l’augmentation de la part du PIB consacrée à la Recherche et Développement. Un des nombreux “non-dits” de l’UE à 27.
Les opinions exprimées dans ce blogue sont strictement personnelles et ne reflètent pas nécessairement celles de Global Brief ou de l’Ecole des affaires publiques internationales de Glendon.