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Une décennie de modernisation des forces navales chinoises

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Une décennie de modernisation des forces navales chinoises

La publication en 2001 de l’ouvrage de Bernard D. Cole, ancien officier de l’U.S. Navy et professeur au National War College de Washington, The Great Wall at Sea, fut accueillie à l’époque comme un véritable évènement dans les cercles militaro-stratégiques américains. L’auteur y développait les stratégies de développement de la PLAN (People’s Liberation Army Navy – soit les forces navales chinoises) pour le XXIème siècle. Il annonçait dans le même temps à la fois les changements importants au sein des forces navales chinoises et des stratégies qui les accompagnent, et le regain d’attention aux Etats-Unis à l’égard de la modernisation de la PLAN, qui est désormais l’objet de rapports réguliers du Pentagone. Sa contribution fut essentielle dans l’identification des trajectoires suivies par la PLAN. La deuxième édition de son livre, très attendue, revient sur les ambitions et les stratégies chinoises, et recense les immenses progrès réalisés en une décennie.

Le bref rappel historique établi par Cole permet d’insister sur le caractère révolutionnaire des tendances actuelles, la Chine s’étant depuis longtemps repliée sur ses capacités militaires terrestres. Mais il met également en perspective les stratégies de développement naval de la Chine, rappelant ainsi que Mao Zedong en avait fait une priorité dans sa guerre de reconquête des îles encore contrôlées par les forces nationalistes de Chiang Kai-shek. Ce n’est que devant l’impossibilité de contrer les capacités américaines déployées dans les années 1950 que le Grand timonier dût renoncer à ses ambitions. Il fallut attendre les années 1980 pour voir une véritable stratégie navale émerger en Chine, ne se limitant plus à la simple défense du territoire national, mais proposant une véritable vision. Le général Liu Haoqing fut à l’origine de cette renaissance de la PLAN, et initia sa modernisation encore en cours. La stratégie de défense de Liu s’est appuyée sur les préceptes de stratégie navale d’Alfred Thayer Mahan, avec pour objectif d’étendre le contrôle chinois aux mers d’Asie orientale.

La marine chinoise est aujourd’hui organisée pour remplir trois objectifs à moyen et long terme. Le premier de ses objectifs est d’être en mesure de faire face et de gagner un conflit avec Taiwan ou en mer de Chine du Sud (cet objectif était fixé à 2010, et on peut considérer qu’il a été respecté). Le second comprend le développement de ses capacités de projection sur ce que Pékin qualifie la première chaîne d’îles entre 2010 et 2020. Cette première chaîne rassemble les îles de Kyushu, Ryukyu, Taiwan, les Philippines et les Célèbes. La dernière mission de la marine est de permettre à la République populaire de Chine (RPC) d’acquérir le statut de puissance régionale dans les mers du Sud-est et le Pacifique Ouest. Les acquisitions au cours de la décennie écoulée (Cole compare ainsi l’état des forces de la PLAN en 2000 et en 2010) répondent à ces différents objectifs.

Au cours de la décennie écoulée, d’autres observateurs se sont penchés sur la montée en puissance des capacités navales chinoises, que ce soit dans l’Océan Indien (avec l’évocation du fameux « collier de perles ») ou dans le Pacifique. Le journaliste américain Robert Kaplan a ainsi publié plusieurs articles dans lesquels il fait mention du déclin de l’hégémonie américaine dans le Pacifique, au détriment de la Chine, invitant au passage les dirigeants américains à réagir. Un positionnement que ne partage pas Cole, qui explique que les stratèges chinois ont au contraire assimilé le fait que la puissance navale américaine est quasi inaccessible, et que la modernisation de la PLAN s’attèle plutôt à concurrencer les autres forces navales asiatiques. De même, les stratégies navales chinoises sont un intéressant dosage entre la mise en avant de la mer, traitée désormais au même niveau que les forces terrestres, et les théories de Mao sur la guérilla. De cette manière, la modernisation ne se limite pas au remplacement d’un équipement qui était dépassé, mais s’étend à toute une culture de la stratégie navale, que ce soit au niveau du processus décisionnel ou dans la formation des officiers. Cole s’attarde ainsi longuement sur le personnel qui compose aujourd’hui les forces navales chinoises, les enseignements qu’il reçoit, ainsi que la chaine de commandement de la PLAN, ne se contentant pas ainsi de proposer, comme c’est trop souvent le cas, un simple catalogue des capacités militaires – ici navales – de la Chine. Au final, Bernard Cole ne cherche pas à se montrer alarmiste, mentionnant au passage les modernisations importantes qui ont également touché les autres pays de la région, mais il insiste sur le fait qu’il faudra désormais bien compter sur les capacités navales de la Chine.

Bernard D. Cole, The Great Wall at Sea. China’s Navy in the Twenty-First Century (deuxième edition), Annapolis, Naval Institute Press, 2010, 368 pages.

Les opinions exprimées dans ce blogue sont strictement personnelles et ne reflètent pas nécessairement celles de Global Brief ou de l’École des affaires publiques et internationales de Glendon.

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