Ne me touches pas!
J’ai appris au fil du temps, du moins je l’espère, à faire la part des choses. Le noir et le blanc sont des extrêmes, il nous faut trouver la bonne teinte de gris. Les problèmes de notre temps, ainsi que les solutions, ne sont pas simples. L’analyse et la réflexion critique sont des outils particulièrement importants. Ceci étant dit, je l’affirme et le répète, je suis contre les scanners corporels dans les aéroports. Ma position est claire et sans ambigüité. Cette technologie n’a pas sa place. Elle viole nos droits fondamentaux. Trop, c’est trop !
Pour ceux qui ne comprennent pas le titre de l’intervention, allez voir sur YouTube les vidéos correspondant à John Tyner, cet américain qui a refusé de se faire ‘agresser sexuellement’ par un agent de la sécurité dans un aéroport. Vous pouvez aussi trouver sur YouTube les images d’une petite fille de trois ans, en pleurs et Dieu sait qu’elle avait raison, alors que des agents de sécurité la retienne et la fouille. Ces exemples ne représentent pas des abus (quoi que la politique américaine, en théorie, ne permette pas la fouille sur des enfants de moins de douze ans). C’est la nouvelle norme, la nouvelle réalité. Et, selon les autorités, on l’entendait encore au Congrès hier, rien ne changera, malgré les protestations populaires. De la foutaise !!!
Quel est le bon équilibre entre le droit collectif à la sécurité et le droit individuel à la vie privée ? C’est la question fondamentale de ce débat. Les scanners corporels sont supposés augmenter la sécurité à l’aéroport et dans les avions. Le ‘hic’, c’est que même les experts ne sont pas convaincus de leur efficacité. La mesure se veut, donc, rassurante. Les autorités démontrent qu’elles travaillent à la sécurité des passagers. C’est un exercice théâtral, histoire de nous faire croire que nous sommes en sécurité. Pour le théâtre, j’irai à Stratsford ou à Niagara-on-the-Lake !
Mon corps m’appartient, c’est la leçon fondamentale que l’on apprend à tout enfant. Personne n’a le droit de le toucher sans mon consentement. Les forces de l’ordre doivent arrêter de penser que nous sommes tous des terroristes. Dans le droit criminel anglais, nous sommes innocents jusqu’à preuve du contraire. Or, avec les scanners corporels, c’est exactement l’inverse. Nous sommes dangereux, jusqu’à ce que les autorités deviennent convaincus du contraire. En ce sens, il me semble que les terroristes, Al Qaeda et les autres, ont déjà gagné. Nous sommes tellement préoccupés par la menace, la simple possibilité, que les autorités sont prêtes à bousiller nos droits fondamentaux sans y penser par deux fois.
Les scanners corporels ne peuvent pas empêcher des extrémistes de passer à l’action. Leur détermination peut généralement être sans bornes. Provoquer un coup d’éclat dans un aéroport peut faire partie de leur multiples plans imaginatifs pour déranger la société et les dommages pourraient être très graves.
Je prends la menace terroriste au sérieux. L’environnement de sécurité internationale a été bouleversé par le 11 septembre 2001. Nous ne pouvons pas, toutefois, légitiment lutter contre le terroriste en abdiquant, an abandonnant, nos libertés.
Je vais tenter d’être juste. Ceux qui proposent cette mesure suggèrent qu’elle est nécessaire pour rehausser la sécurité (ce que je conteste). Ils assurent que l’intrusion est minime, que ce que l’on voit au scanner, n’est pas personnel. Ils affirment aussi qu’il n’y a pas de risque pour la santé, même pour les voyageurs fréquents. Selon eux, c’est un petit sacrifice, par rapport à l’immense danger que pose le terrorisme. En dernier lieu, ils suggèrent que la mesure est efficiente, puisqu’elle permet de diminuer le temps passé au contrôle de sécurité par les passagers.
En réplique, ce n’est pas une petite intrusion dans ma vie privée. Mon corps est ce que j’ai de plus privé. Parlons efficience : soyez, donc, moins zélés lors des contrôles. Je n’ai aucune idée comment transformer mon tube de dentifrice en bombe. J’ai volé aux USA récemment. Je ne me sentais pas plus ou moins en sécurité que lorsque je volais en Europe l’hiver passé.
C’est probablement une cause perdue ! J’en conviens, je le sais d’avance. Et, si je veux voyager, je dois me plier à ces mesures. Je les accepte difficilement. Je n’ai peut-être pas le courage de John Tyner, mais je lui souhaite la meilleure des chances !
Caveat lector : Les opinions exprimées dans ce blogue sont strictement personnelles et ne reflètent pas nécessairement celles de Global Brief ou de l’École des affaires publiques et internationales de Glendon.
complètement d’accord!