Vive les DOM-TOM
Les jeunes écoliers français les apprennent par cœur à l’école, mais ont parfois du mal à les situer sur une carte du monde quand ils sont originaires de la métropole. Les départements et territoires d’Outre-mer (DOM-TOM) sont souvent les grands oubliés de la République française. Seulement voilà, on votait pour les élections régionales dans quatre d’entre eux : la Guyane française, la Martinique, la Guadeloupe et la Réunion. Généralement, le résultat des élections dans ces départements est peu suivi et encore moins commenté. Mais au soir du résultat des élections régionales et de la vague rose (couleur du parti socialiste) qui s’est abattu sur le pays, le secrétaire-général de l’UMP, Xavier Bertrand, s’est senti obligé de rappeler le score dans les DOM-TOM, faisant ainsi « passer » le nombre de régions de 22 à 26. La raison : l’UMP a remporté l’élection à la Réunion (ce qui est au passage un succès historique dans cette île) et en Guyane française, ce qui permet au parti du président Sarkozy de remporter au total 3 régions (en incluant l’Alsace), soit mieux que les 2 régions revenues à la droite parlementaire à l’issue du scrutin précédent, en 2004 (Alsace et Corse) ! On se rassure comme on peut, et les DOM-TOM sont soudain bien utiles. On disait après 2004 que la gauche contrôlait 20 régions sur 22, il faudra donc désormais considérer qu’elle en contrôle 23 sur 26…
Plus sérieusement, le résultat de ce second tour n’a fait que confirmer la tendance qui s’était dégagée une semaine plus tôt, à savoir un net recul de l’UMP, ce qui est particulièrement inquiétant à deux ans de l’élection présidentielle. La gauche représente aujourd’hui 52% des voix contre 35% à la droite parlementaire au plan national. Le Front national recueille de son côté environ 10% (chiffre qui ne tient compte que des régions dans lesquelles le parti d’extrême droite a pu se maintenir au second tour dans des triangulaires, soit en deça de son score réel). Etant parvenue, à de rares exceptions près, à se montrée unie au second tour, la gauche signe ainsi l’un de ses meilleurs scores de l’histoire de la Vème République. En 2004, elle avait recueilli 49,9% des suffrages, contre 38,6% à la droite parlementaire. On estimait déjà à l’époque que ce résultat était exceptionnel. Ce sont, sans doute plus que le nombre de régions contrôlées, les chiffres qu’il faudra retenir de ce scrutin.
Le gouvernement ne peut que reconnaître sa défaite au niveau national, de nombreux ministres ayant notamment été battus dans leurs régions respectives. « Les résultats obtenus sont en deça, à l’évidence, des attentes de la majorité », a ainsi déclaré le ministre de l’Intérieur Brice Hortefeux, ajoutant tout de même, histoire de ne pas concéder la défaite trop facilement, que « contrairement à l’objectif qu’il s’était fixé publiquement et officiellement, le Parti socialiste ne parvient pas à conquérir la totalité des régions ». Un moyen de se rassurer sur le fait que cette élection, la dernière avant les deux échéances majeures de 2012 (présidentielles et législatives) n’est pas une débâcle, même si ça y ressemble beaucoup. Il va falloir en tout cas pour la majorité tirer les leçons de cette élection, et notamment éviter des querelles en interne qui semblent pourtant plus que jamais presque inévitables. Nicolas Sarkozy espérait sans doute, après le score de 2004, profiter d’un rebond de l’UMP aux régionales (difficile en effet de faire pire quand on ne contrôle que deux régions…) pour pouvoir vanter les mérites de sa politique. Il lui faudra désormais payer le prix d’une impopularité qui le place en position difficile, et redoubler d’efforts pour composer avec les « ennemis de l’intérieur », ceux qui au sein de son propre parti rêvent déjà de la relève. Décidément, les élections régionales ne sont pas des élections mi-mandat, mais dans un contexte marqué par la simultanéité des présidentielles et des législatives (il faut remonter à 1997 pour voir ces deux élections ne pas coïncider), quinquennat oblige, elles y ressemblent beaucoup !
Les opinions exprimées dans ce blogue sont strictement personnelles et ne reflètent pas nécessairement celles de Global Brief ou de l’École des affaires publiques et internationales de Glendon.
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Le titre du sujet est, je trouve, très pertinent, quant à l’importance des DOM-TOM au lendemain d’un tel scrutin.
Néanmoins, mettre en avant le “score” électoral de la gauche comme une victoire de celle-ci et montrer par là la mauvaise posture de la droite parlementaire, n’est-ce pas renforcer ce discours dominant depuis la fin des élections régionales, à savoir prédire une potentielle défaite de Nicolas Sarkozy lors des prochaines présidentielles ?
En effet, d’une part il reste encore deux ans avant les prochaines élections présidentielles, ce qui n’est pas négligeable dans un quinquennat, mais d’autre part, vous ne mentionnez pas le très fort (et inadmissible) taux d’abstention. Quelle est premièrement la légitimité du résultat de la gauche à ces élections lorsque l’on voit un taux de participation aussi faible? Ensuite, nous pouvons également nous demander si cette abstention n’est pas dû à une lassitude de la part d’un électorat plutôt “conformiste”, qui vote plutôt pour les partis principaux (UMP et PS on s’entend), et qui se sentira dès lors plus concerné lors d’élections présidentielles, ce qui donnera des résultats à nouveau en faveur de la droite parlementaire actuelle, et en défaveur du parti socialiste…
Bien vu Alexandra. Voius avez parfaitement raison de mentioner cette forte abstention qui perturbe le resultat. Cependant, dans une election qui tend de plus en plus a devenir uen sorte de “mi-mandat”, en l’absence d’elections legislatives separees du scrutin presidentiel, la notion de victoire n’est pas aussi importante que celle de defaite. Des lors, il ne s’agit effectivement pas d’une victoire pour le parti socialiste, qui ne termine premier que par defaut, et malgre ses fortes divisions internes. Mais c’est un bon indicateur du desavoeu de la politique de Nicolas Sarkozy, et sans un changement de politique et de methode, la sanction se poursuivra en 2012. Les divisions naissantes qu sein de l’UMP confirment deja que le sarkozysme se fissure, et qu’il faudra trouver d’autres slogans si la majorite vut se maintenir au pouvoir. En face, le parti socialiste s’accomodera de toute facon tres bien d’une victoire par defaut, un peu comparable a celle de 1997…