Méditerranée: quelles aides au développement ?
La Tunisie, l’Algérie, le Maroc et l’Egypte attirent l’attention sur la question des régimes politiques sur la rive Sud de la Méditerranée. L’actualité démontre aussi combien le facteur démographique est un paramètre clé de la géopolitique, tant le désespoir des jeunes démultiplie leur détermination. Ces mouvements posent encore la question du développement. Le rapport au Président de la République française rédigé par la “Commission sur le financement du codéveloppement en Méditerranée” présidée par Charles Milhaud permet de faire le point sur les aides au développement dans la région.
20 milliards d’euros… pour un résultat inégal
Les 16 pays des rives Sud et Est du bassin méditerranéen ont reçu en 2009 environ 20 milliards d’euros d’aides diverses. Sur un PIB régional de 1 160 milliards d’euros, cela représente 1,7%.
Le rapport Mihlaud attire l’attention, de façon peut être excessive, sur l’inégale répartition de l’aide de l’Europe communautaire aux pays du voisinage. En effet, l’Union européenne consacre 1,3 milliard d’euros aux pays des Balkans et à la Turquie – des pays qui ont des perspectives officielles d’adhésion – et “seulement” 1 milliard d’euros à la rive Sud de la Méditerranée alors qu’elle compterait 2,5 fois plus d’habitants, mais n’a pas de perspective officielle d’adhésion. Relevons, cependant, que le Maroc bénéficie d’un statut de partenaire avancé. Est-il vraiment incohérent que l’UE privilégie l’aide aux pays supposés devenir un jour membres de l’Europe communautaire ?
Qui sont les principaux donateurs ?
Quoi qu’il en soit, les financements des aides dépendent de trois principaux donateurs. 60% de l’aide total vient de l’Union européenne, incluant la Banque européenne d’investissement (BEI), et de la Banque mondiale.
En matière d’Etats, la France et les Etats-Unis sont les principaux pays donateurs. Paris contribue ainsi pour 30% de l’aide publique totale reçue par l’Algérie, la Tunisie et la Lybie. Manifestement, cela n’a pas suffit à assurer un développement satisfaisant en Algérie et en Tunisie. Dans les deux cas, des dirigeants prédateurs ont détourné la richesse du pays.
Qui sont les principaux bénéficiaires ?
Les aides de diverses origines sont en fait concentrées sur trois pays. 53% du total de l’aide disponible va la Turquie, l’Egypte et au Maroc. Autre bénéficiaire important: les territoires palestiniens. Notons que les fonds européens ne donnent à l’UE aucun poids dans la crise du Proche-Orient.
Quoi qu’il en soit, l’urgence du développement demeure. Le dispositif actuel de financement du développement prend peu en compte les difficultés de long terme des entreprises, en particulier des Petites et Moyennes Entreprises (PME) et des Très Petites Entreprises (TPE). Notons cependant que tout l’or du monde ne pourra jamais suppléer aux insuffisances de la gouvernance des pays de la rive Sud. Le développement est d’abord un processus endogène qui souffre notamment de la corruption. Or les pays de rive Sud affichent des indicateurs très peu satisfaisants en la matière.
Que faire ?
Le rapport Milhaud propose la création d’une institution dédiée au financement du co-développement en Méditerranée, associant les pays du Sud à la gestion, et visant la notation AAA pour fournir aux meilleures conditions les financements nécessaires. Un challenge.
Les défis à relever de part et d’autres sont considérables pour améliorer la situation économique de la rive Sud du bassin méditerranéen. Pour l’heure, les organisations internationales, les Etats et les donateurs restent dans l’expectative.
Les opinions exprimées dans ce blogue sont strictement personnelles et ne reflètent pas nécessairement celles de Global Brief ou de l’Ecole des affaires publiques et internationales de Glendon.