K-Pop au top
Le tube de l’artiste Psy, « Gangnam Style », est en train de s’imposer comme un phénomène planétaire, désormais à la conquête des pays occidentaux après avoir inondé l’Asie et submergé la Corée du Sud. Souvent moqué à tort ou à raison, son succès surprend autant qu’il ne laisse pas insensible. Il est cependant emblématique de la montée en puissance progressive de la Korean Pop (ou K-Pop), qui dépasse désormais très largement les frontières du pays du matin calme.
Le hallyu, ou vague coréenne, déferle sur les pays occidentaux depuis maintenant plusieurs mois. Juin 2011, les quotidiens sud-coréens n’en avaient que pour la France. Jack Lang était envoyé par Nicolas Sarkozy à Séoul pour remettre en grandes pompes des ouvrages historiques détenus par la France depuis la fin du XIXème siècle. Mais c’est surtout un autre évènement qui symbolisa alors l’amitié entre les deux pays. Dans la salle du Zénith de Paris, plusieurs artistes coréens se produisaient pour la première fois en concert dans une capitale occidentale. L’évènement fut peu médiatisé en France, mais il est connu de tous en Corée, où des enregistrements audio et vidéo sont même en vente depuis. Pour la K-Pop, il y a un avant et un après Zénith, et juin 2011 marque le début d’une reconnaissance internationale que le succès de Psy ne ferait dès lors que confirmer.
En Corée du Sud, les stars de la K-Pop font rêver les adolescents, qui se pressent par millions pour participer aux innombrables compétitions visant à dénicher les futurs talents. Voice of Korea, K-Pop Star, Superstar… autant d’émissions de grande audience qui alimentent en permanence les nouvelles recrues et renouvellent les tubes, au point qu’on s’interroge sur la durée de vie d’un morceau à grand succès. Les Coréens sont fiers de leur K-Pop, comme ils sont fiers de leurs marques de renom, Samsung ou LG en tête.
En Asie, la confirmation du succès du hallyu ne date pas d’hier. Depuis la fin des années 1990, la Corée exporte des séries télévisées qui rencontrent un succès phénoménal au Japon, en Chine, à Taiwan et en Asie du Sud-est. La K-Pop s’est imposée plus récemment, mais elle fait des ravages, au point que les concerts des artistes coréens dans d’autres pays asiatiques se font de plus en plus nombreux, avec à chaque tournée salle comble. Si les autres artistes asiatiques sont souvent cantonnés dans leur environnement linguistique (ce qui est déjà vaste pour les chanteurs sinophones…), les Coréens parviennent à s’exporter, et selon plusieurs sources, les recettes de la K-Pop seraient même aujourd’hui majoritairement issues des ventes à l’étranger. Comment dans ces conditions expliquer le succès grandissant de ce phénomène ?
D’abord, il faut regarder le produit, et force est de constater que le façonnage des stars en Corée est un art bien maitrisé et qui répond à des critères très précis. Boys bands, girls bands, quelques artistes en solo généralement un peu plus âgés (comme Psy, qui a 34 ans) sont les différentes facettes de la K-Pop. Les chansons sont construites autour de rythmes très enlevés, avec un moment de répit suivi d’une explosion (et souvent un long cri d’un des chanteurs), et des refrains contenant de manière quasi systématiques une ou deux phrases en anglais. Les noms des groupes et les titres des chansons eux-mêmes sont souvent en anglais, et donc plus accessibles pour un public international. Il y a ensuite la présentation. Les garçons doivent être rebelles et courtois à la fois, un peu efféminés et bons danseurs. Les filles doivent être jolies (en répondant à des critères devant séduire le plus grand nombre, ce qui explique qu’on trouve systématiquement des brunes, des blondes, des rousses, etc), et leurs danses doivent être un brin suggestives, mais sans être osées. La Corée du Sud reste une société conservatrice où des écarts trop brutaux pourraient être mal acceptés.
Le marketing joue évidemment un rôle essentiel. Vidéos, rabâchage à longueur d’ondes et de canaux télévisés, publicités en permanence… la K-Pop ne fait pas partie du quotidien des Coréens, elle est omniprésente. Ce marketing s’exporte à grand renfort de publicités annonçant des concerts géants, et comme indiqué précédemment, des titres de chansons faciles à retenir, de préférence en anglais.
La dernière recette de ce succès tient en une stratégie de soft power très active que mène le gouvernement sud-coréen. La K-Pop est, au même titre que la fiction, l’artisanat et le tourisme, une priorité en matière de rayonnement de la culture et du savoir-faire coréen. Les pouvoirs publics ne se contentent d’ailleurs pas d’encourager son développement, ils l’assistent en jouant un rôle essentiel dans l’organisation de grands évènements. Le succès de la K-Pop, c’est celui de la Corée, et il n’est pas surprenant dans ces conditions de voir de plus en plus régulièrement des responsables politiques coréens s’entourer d’artistes lors de leurs déplacements à l’étranger.
Les opinions exprimées dans ce blogue sont strictement personnelles et ne reflètent pas nécessairement celles de Global Brief ou de l’École des affaires publiques et internationales de Glendon.
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