Le GAFI
La gouvernance internationale n’est pas un sujet nouveau. Les États reconnaissent depuis longtemps qu’ils ont besoin de travailler ensemble et de coopérer pour répondre à des défis communs. Suite à la crise financière et économique 2007-2009, la nécessité de collaborer est de nouveau devenue apparente. Quels sont les exemples existants de bonne gouvernance internationale? Plus simplement, qu’est-ce qui fonctionne?
J’ai été invité récemment à participer à une proposition de panel pour la conférence annuelle de l’Association américaine de science politique qui se tiendra en septembre prochain à Washington, DC. Ce panel, s’il est accepté, traitera du Groupe d’action financière internationale, (le GAFI), l’organisation en charge de la lutte au blanchiment d’argent et au financement du terrorisme. Notre panel est composé de cinq chercheurs. Je ne sais pas quelle direction prendra la discussion une fois sur place, mais ce qui frappe de nos échanges initiaux est notre questionnement commun. Le GAFI est-il un modèle de gouvernance internationale?
Pour ceux qui ne connaissent pas le GAFI, je vous invite à visiter leur site web afin de bien comprendre le fonctionnement de l’organisme (http://www.fatf-gafi.org/).
Mon raisonnement préliminaire est le suivant : comme organisation internationale de politique publique, le GAFI est efficace. Il est vrai que durant sa première décennie, le GAFI a été créé en 1989, la lutte au blanchiment d’argent a d’une certaine façon piétinée. Depuis dix ans, surtout avec la guerre au terrorisme, le GAFI est de plus en plus actif, prenant sa place et s’imposant comme étant l’organisation de référence dans la lutte à l’argent sale. Le GAFI a redéfini le concept de blanchiment d’argent, a vu son mandat prendre de l’ampleur avec la lutte au financement du terrorisme et on lui demande maintenant de s’occuper de corruption et d’argent sale. Le GAFI a un membership restreint, un peu plus d’une trentaine de pays, ce qui lui permet de répondre rapidement aux nouveaux défis. Ceci étant dit, il y a plein d’organismes régionaux, de mini-GAFIs, qui assurent le suivi, permet la dissémination des normes, et assurent une présence mondiale. Le GAFI a émit quarante recommandations pour contrer le blanchiment d’argent et neuf recommandations particulières pour la lutte au financement du terrorisme, des recommandations qui ont été modernisées à deux occasions et auxquels s’ajoutent de nombreux avis. Ces recommandations sont maintenant presqu’universellement acceptées (quoi que beaucoup reste à faire pour qu’elles soient bien appliquées). Le GAFI assure le respect de ces règles par un processus d’évaluation par les paires ainsi que par la menace d’humiliation publique; le GAFI a élaboré au tournant du siècle une liste noire d’États et de juridictions problématiques (‘the name and shame approach’). En gros, le GAFI répond aux attentes.
Le GAFI n’est pas parfait. Plusieurs l’ont accusé de ne pas être particulièrement démocratique et d’être dominé par quelques grands États; en plus, ils l’accusent de bullying contre des petits pays. Le GAFI opère parfois de façon assez secrète. Le GAFI a-t-il imposé une norme pour un problème dont l’ampleur a été exagérer? Quels sont les vraies avancées dans la lutte au blanchiment d’argent?
L’évaluation ultime du GAFI est subjective, j’en conviens. J’ai tendance à voir le verre à demi-plein, a considéré que le GAFI a permit d’importances percées. D’autres, évidemment, sont en désaccords. Je pense aux alternatives, à d’autres exemples de gouvernance internationale, et je ne suis pas convaincu de leur efficacité. Le Sommet de Copenhague confirme que la gouvernance internationale ne peut pas se faire par l’entremise de grands sommets chaotiques! Le G20 et le G8 ont des mandats plus larges; le G20 surtout doit prouver son efficacité puisqu’il est composé d’États avec des intérêts très différents. J’affirme simplement que lorsqu’il s’agit de s’en prendre à un problème de politique publique, lorsqu’il faut agir efficacement, le GAFI, il me semble, est un bon exemple – un exemple qui dans plusieurs cas pourrait être adapté et copié. Le GAFI représente le possible.
Sur un sujet complètement différent… J’ai entendu hier Hillary Clinton dire qu’il faudrait 100 milliard de dollars annuellement en 2020 pour lutter contre les changements climatiques. Cet argent irait surtout aux pays en voie de développement. Ce montant est complètement ludique et cela même si vous êtes ouvert à l’argumentaire sur les changements climatiques. Mr. Harper, svp, gardez notre argent avant qu’elle ne soit gaspillée dans plein de projets insensés!!!
Caveat lector : Les opinions exprimées dans ce blogue sont strictement personnelles et ne reflètent pas nécessairement celles de Global Brief ou de l’École des affaires publiques et internationales de Glendon.