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Le Royaume-Uni et l’Europe

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Le Royaume-Uni et l’Europe

Scène de la vie parisienne, dans une poste, devant une machine à timbrer.

A l’instant, un Français d’une soixantaine d’années vient de me demander : « Le Royaume-Uni est-il dans l’Union européenne à 27 ? »

Oui Monsieur, depuis … 1973. A l’époque, on ne parlait pas d’Union européenne (UE) mais de Communauté économique européenne (CEE). C’est le traité de Maastricht qui transforme en 1993 la Communauté économique européenne en Union européenne. Et le Royaume-Uni est aussi membre de l’Organisation du traité de l’Atlantique nord (OTAN), à laquelle appartiennent aujourd’hui 21 des 27 Etats de l’Union européenne. Chacun sait, notamment au Canada, que plusieurs membres de l’OTAN… ne sont pas membres de l’Union européenne. En revanche, le Royaume-Uni n’est pas membre de la Convention Schengen, un espace de libre circulation entre 22 Etats membres de l’Union européenne et trois Etats hors UE mais associés, l’Islande, la Norvège et la Suisse… pour simplifier. Le Royaume-Uni n’est pas davantage membre de la zone euro, à laquelle appartiennent seulement 16 des 27 pays membres de l’UE…

Les Britanniques sont souvent d’excellents diplomates

Alors, oui Monsieur, le Royaume-Uni est membre de la Communauté économique européenne … depuis 1973, soit trois ans après le décès du général de Gaulle qui par deux fois avait refusé l’entrée de Londres, y voyant un cheval de Troie des Etats-Unis. Cheval de Troie ou pas, le Royaume-Uni a apporté avec lui sa culture du lobbying. Londres a su contribuer, pour son compte ou pour celui d’autrui, à une libéralisation prononcée de la construction de l’Europe communautaire. Comme me le confiait l’Ambassadeur de France Bernard Dorin : « Les Britanniques sont souvent d’excellents diplomates, quel dommage qu’ils soient à la fois un pied dans et un pied en dehors de l’Union européenne. » Le Professeur Serge Sur à qui je rapportais récemment cette conversation en regrettant que les compétences de Londres ne soient pas davantage mises au service de la construction communautaire m’a répondu du tac au tac : « Oui, mais alors les Britanniques ne seraient plus eux-mêmes… »

Quelle Europe de la défense ?

Quoi qu’il en soit, le Royaume-Uni reste avec la France un des rares pays de l’Union européenne à consentir des efforts budgétaires significatifs en matière de défense… mais a beaucoup fait pour couper les ailes de la Politique européenne de sécurité et de défense (PESD), de crainte que cette créature communautaire ne concurrence l’OTAN. Depuis juin 2008, le Livre blanc de la défense française pose que l’OTAN et la PESD ne sont pas concurrentes mais complémentaires. Les mutations de la configuration géopolitique de l’Europe post-guerre froide aidant, la France est finalement revenue dans le commandement militaire intégré de l’OTAN, en 2009. Ce qui me fait penser à l’examen d’un officier de l’armée des Etats-Unis, un marine stagiaire au Collège interarmées de défense l’année passée, où je dirige le séminaire « Géopolitique des élargissements de l’OTAN et de l’UE ». Avec un délicieux accent américain, il avait confié au jury : « Au terme de cette année d’étude, j’ai compris que l’Europe… c’est compliqué, plus compliqué que je ne le pensais en arrivant ici. »

De l’utilité du débat démocratique

Oui Monsieur, c’est compliqué l’Europe. D’ailleurs, c’est quoi l’Europe ? L’Europe géographique – jusqu’à l’Oural et au détroit du Bosphore disent certaines conventions – ou l’Europe communautaire, synonyme d’Union européenne ? Tout cela mériterait un bon débat. Et c’est souvent ce qui a manqué à l’Union européenne, construite en contournant le politique. Une Union européenne que les élargissements post-guerre froide (1995, 2004, 2007) ont enrichi mais aussi appauvri, en tout cas changé de nature. Et pourquoi pas, mais encore aurait-il été bon d’en parler. Faute de quoi la participation aux élections pour le Parlement européen ne cesse de diminuer depuis … 1979. Alors comment s’étonner en 2010 qu’un Français d’une soixantaine d’années ne sache pas encore que le Royaume-Uni fait partie de l’Union européenne ? Et combien connaissent sa superficie et son nombre d’habitants ? Amusez-vous à poser ces questions en société, vous serez surpris des réponses. L’Union européenne à 27 s’étend sur 4,3 millions de kilomètres carrés et compte 500 millions d’habitants… et beaucoup l’ignorent. Pourtant, l’Union européenne c’est un peu notre « maison » et les habitants des autres pays membres nos « colocataires », avec toutes les réserves dues à ce genre de comparaison. Certes, l’Union européenne est complexe, mais elle peut aussi devenir passionnante si on prend le temps de l’aborder sans les œillères d’une idéologie, si on met le doigt sur les questions qui dérangent. Alors, oui Monsieur, l’expérience l’a démontré mille fois, l’Europe communautaire intéresse, de 7 à 77 ans, voire plus.

Pour autant, j’entends aussi ce qu’un diplomate asiatique m’a confié hier : « Nous cherchons à comprendre comment fonctionne les institutions du traité de Lisbonne. Bien sûr, nous entendons qu’il faut laisser du temps aux Européens… mais l’histoire continue et le monde n’attendra pas l’Union européenne. La planète aura-t-elle encore besoin de l’Union européenne quand ses nouvelles institutions seront pleinement opérationnelles… en 2014, voire 2017 ? »

Sinon, on ne demandera pas « Le Royaume-Uni est dans l’Union européenne à 27 ? » mais « L’Union européenne existe-t-elle encore ? »

Les opinions exprimées dans ce blogue sont strictement personnelles et ne reflètent pas nécessairement celles de Global Brief ou de l’Ecole des affaires publiques et internationales de Glendon.

The opinions expressed in this blog are personal and do not necessarily reflect the views of Global Brief or the Glendon School of Public and International Affairs.

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