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Après les Républicains

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Après les Républicains

La réélection de Barack Obama, finalement plus nette qu’annoncée, marque un nouveau revers pour le parti républicain, dont les conséquences sont incertaines. De fait, si une défaite d’Obama aurait immédiatement été interprétée comme un vote sanction pour un mandat pas suffisamment abouti, l’échec de Mitt Romney est avant tout celui de son parti. On pourrait même aller jusqu’à dire que quand le candidat républicain s’est montré dangereux pour son adversaire démocrate, c’est justement quand il endossa un costume plus consensuel, et prôna une approche plus bipartisane des dossiers. En d’autres termes, quand il fut exactement l’inverse de ce qu’est devenu le Grand Old Party (GOP) et ce qu’il a montré au cours des quatre dernières années. La question est désormais, une fois encore, posée de l’avenir de ce parti, de son discours, de son électorat, de ses élites et de sa faculté à se positionner à nouveau comme un grand parti capable de remporter une élection nationale (et non par accident), et ne pas se limiter à des scrutins locaux. Le parti républicain tel qu’il existe aujourd’hui va nécessairement devoir changer, mais dans quelle direction ?

It’s not just the economy, stupid !

L’économie fut, de manière ô combien légitime en temps de crise, au cœur de cette élection. Comme de la précédente d’ailleurs, et comme c’est souvent le cas aux Etats-Unis. Mais qu’on ne s’y trompe pas, si elle occupe un rôle central, l’économie n’explique pas à elle seule la défaite des Républicains. C’est peut-être même elle qui a permis que cette défaite ne soit pas encore plus nette, et c’est sans doute ce qui permet au GOP de conserver la majorité de la Chambre des représentants. Barack Obama sera donc le premier président américain depuis FDR à être élu avec un taux de chômage supérieur à 8%, un déficit du budget et de la balance commerciale qu’on ne compte même plus, et un bilan finalement très mitigé sur ces questions. L’économie reste importante, mais elle n’a pas été suffisante, et sur les deux projets économiques et sociaux très distincts qui étaient proposés aux Américains, c’est bien le modèle keynésien qui l’emporte, comme il y a quatre ans. Pour autant, les électeurs n’ont pas montré un enthousiasme délirant dans les capacités de Barack Obama à relever l’économie, sujet sur lequel Romney a fait l’essentiel de sa campagne. La leçon de ce scrutin, c’est donc que les électeurs ont porté leur choix sur d’autres critères, et gageons que les valeurs ont joué un rôle important, dans cette véritable guerre culturelle que mènent les deux partis, lutte fratricide aux conséquences funestes pour le fonctionnement des institutions, mais que les Démocrates semblent mieux maitriser à échelle nationale. Les idées des Républicains ne sont ni marginales, ni dépassées pour de nombreux électeurs, mais elles s’expriment avec maladresse, et les sorties de plusieurs élus ou candidats sur l’avortement ont été l’un des principaux handicaps d’une campagne sur laquelle Romney s’est lui-aussi permis quelques gaffes.

Un parti dépassé par les réalités sociologiques américaines ?

Une fois encore, les Républicains l’emportent dans la majorité des Etats, mais les moins peuplés (à l’exception du Texas), et les plus ruraux. Et si on regarde de façon plus détaillée la carte des Etats-Unis, on constate immédiatement ce décalage entre zones rurales et milieux urbains, où les Démocrates sont largement dominants dans l’ensemble. Ce n’est pas nouveau, mais ne nous voilons pas la face : miser sur un électorat rural, ce n’est pas le meilleur des paris sur l’avenir ! Le parti républicain tarde également à s’adapter aux réalités sociologiques et raciales d’une société multiethnique, et qui l’est de plis en plus. Finalement, il faudrait au GOP un Obama ou, peut-être mieux encore (quoi que) un candidat « latino ». Allez, on fait un pari, il y aura dans quatre ans dans la course aux Primaires au moins un latino, voire plus (ou « proche » des latinos, comme Jeb Bush qui est marié à une mexicaine…). Le problème est que le profil du candidat ne suffit pas forcément. Avec une base conservatrice qui, soyons honnête, est parfois très rétrograde sur les questions raciales, ce n’est pas gagné ! Il va falloir beaucoup de courage pour un candidat représentatif de cette Amérique multiethnique d’émerger dans un parti qui n’est pas encore préparé, et qui immanquablement se montrera très divisé sur la question.

Quel poids pour les conservateurs?

Des divisions, parlons-en justement. De l’avis de l’intéressé lui-même, Mitt Romney était le seul homme capable de battre Barack Obama. On peut s’en moquer aujourd’hui, mais ce n’est pas entièrement faux. Si Obama avait été opposé à un des conservateurs radicaux que Romney est parvenu, non sans mal, à écarter lors des Primaires, la facture aurait été autrement plus salée, et on peut même estimer que les Républicains auraient eu des difficultés à conserver leur majorité à la Chambre. Mais il n’est cependant pas sûr du tout que les franges les plus conservatrices du parti l’entendent de cette oreille. L’argument pourrait même plutôt être : « puisqu’un modéré s’est montré incapable de battre Obama, la prochaine fois on mise sur un vrai conservateur ». En d’autres termes, la grande bataille d’influence au sein du GOP commence dès aujourd’hui, et il faut s’y préparer : there will be blood !

Une certaine idée de l’Amérique à repenser

Depuis plusieurs années maintenant, nombreux sont les observateurs qui annoncent une sorte de déclin relatif des Etats-Unis, au point de s’interroger sur un monde post-américain. Pendant la campagne électorale, et devant les difficultés rencontrées par l’administration Obama pour faire adopter de grandes réformes, d’autres ont évoqué un après-Obama, augurant tant la défaite du président sortant que la fin d’un modèle. Cette élection confirme que la question la plus pertinente que les Américains, conservateurs en tête, doivent désormais se poser est le quid de l’après-Républicains. Cette question ne concerne pas le parti lui-même, qui après tout représente toujours environ 50% des électeurs, comme la encore rappelé cette élection, mais l’avenir des idées qu’il véhicule. Des divisions très (trop) nettes dans ses rangs, et surtout un projet de société pour l’Amérique qui semble aujourd’hui tout aussi décalé que le messianisme sur la scène internationale que Romney tenta un moment d’imposer, avant d’être ramené à la raison et d’être (dixit Obama) un « faux Romney » lors des débats télévisés, entendez un Romney masquant ses penchants conservateurs, comme on masquerait des vices pour ne pas être décrédibilisé. L’Amérique des Républicains a fait rêver des peuples entiers, et imposé au monde un messianisme parfois bienvenu. Mais ça, c’était l’Amérique d’avant…

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